Pas d’image
Publication suite à l‘atelier de recherche et de création.
20,4 x 13,2 cm
2010, épuisé
1er juillet 2010, 10 novembre 2017
Comment faire œuvre d’œuvres absentes, détruites, perdues ? Le Centre national des arts plastiques (CNAP) gère une collection de plus de 90 000 œuvres, acquises depuis le 19ème siècle par l’État à des artistes vivants. Déposées, parfois de longue date, partout en France, certaines des plus anciennes de ces œuvres ont connu les vicissitudes des temps, les guerres, les bombardements, les incendies et parfois l’oubli. Depuis 1996, une équipe dédiée de conservateurs effectue le récolement de ces œuvres, sillonnant les territoires, fouillant les archives. Elle en retrouve beaucoup. D’autres manquent et manqueront toujours. Dans le cadre d’un « atelier de recherche et de création » conduit par Liliane Viala pour l’École supérieure d’art de Rueil Malmaison, Quentin Lefranc s’est attaché à ces œuvres dont ne subsiste aucune image et qui n’existent plus que par leur notice. Dans la salle de réunion du CNAP, il a ainsi réalisé un accrochage leur donnant une nouvelle présence sous la forme de fins traits de crayons traçant leurs dimensions et rythmés de cartels d’exposition qui disent tout ce que l’on sait d’elles. Un catalogue intitulé « Pas d’image », maquetté par Marine Jezequel, accompagne cette installation éphémère. Traces pour des traces, le travail de Quentin Lefranc est à la fois très juste, d’une grande rigueur plastique et d’une poésie infinie.
Pierre Oudart
Pas d’image Accrochage dans la salle de réunion du CNAP Les échanges avec les personnes qui travaillent au service du récolement du CNAP m’ont fait découvrir une notion pour eux quotidienne : l’existence juridique d’une œuvre détruite ou présumée détruite – il ne reste de matérialisation des œuvres détruites ou disparues qu’un numéro, un titre, un souvenir. Je me suis alors demandé comment donner une nouvelle existence plastique à une œuvre absente, notamment après cette remarque de l’une de ces personnes : « Il n’y a pas de traces dans l’espace de ces œuvres présumées détruites. » J’ai ainsi souhaité réaliser un « accrochage » de quelques-unes des œuvres disparues, dans la salle de réunion de l’établissement, située au premier étage. Le contour des œuvres, à leurs dimensions exactes, vient s’inscrire comme une trace au mur. Un cartel sur lequel est reproduite la notice de chaque œuvre permet au visiteur de reconstituer une image, nécessairement subjective. L’équipe du récolement ayant occupé provisoirement cette salle tout l’hiver pendant que ses bureaux étaient en rénovation et alors qu’elle est aujourd’hui partie, ces traces d’œuvres sont tout autant la trace de leur présence, un souvenir.
Quentin Lefranc